DPE 2026 : 850 000 logements électriques reclassés

Le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), instauré en 2006 puis profondément réformé en 2021, est devenu un outil incontournable pour les acteurs du marché immobilier. Il conditionne la valeur d’un bien, l’accès aux aides à la rénovation, et surtout, depuis la loi Climat et Résilience d’août 2021, la possibilité de louer un logement. Mais cet indicateur, censé refléter objectivement la performance énergétique d’un bien, a longtemps été critiqué pour son biais contre les logements chauffés à l’électricité.

C’est ce déséquilibre que la réforme prévue au 1er janvier 2026 entend corriger. Une évolution technique apparemment mineure – la révision d’un coefficient de conversion – pourrait modifier en profondeur la classification de 850 000 logements classés F ou G.

Un changement méthodologique mais un impact massif

Le DPE repose sur une évaluation en énergie primaire, c’est-à-dire l’énergie nécessaire à la production et au transport de l’électricité ou du gaz, et non seulement l’énergie consommée directement par le logement. Or, depuis 2013, l’électricité était convertie avec un coefficient de 2,3, bien plus élevé que celui appliqué aux énergies fossiles. Résultat : à consommation égale, un appartement chauffé à l’électricité apparaissait plus énergivore qu’un logement chauffé au gaz.

À partir de 2026, ce coefficient sera abaissé à 1,9, afin de refléter l’évolution du mix électrique français, largement décarboné grâce au nucléaire et aux renouvelables. Derrière ce chiffre, il y a une volonté politique claire : mettre fin à une distorsion de concurrence entre énergies et réhabiliter l’électricité comme solution de chauffage compatible avec les objectifs climatiques.

“Cette évolution du calcul du DPE permet de mieux refléter la réalité du mix énergétique français et de mettre fin à une distorsion de traitement défavorable aux logements chauffés à l’électricité.”

(Ministère de la Transition écologique, communiqué de presse du 22 février 2024)

Des précédents qui expliquent la réforme

Cette correction fait écho aux critiques formulées dès 2021, lors de l’entrée en vigueur du “nouveau DPE”. Plusieurs associations de propriétaires avaient dénoncé un classement disproportionné des petits logements chauffés à l’électricité en catégorie F ou G, entraînant pour leurs propriétaires une interdiction progressive de location (2025 pour les G, 2028 pour les F). En 2022 déjà, le gouvernement avait dû suspendre temporairement l’application du DPE sur les logements construits avant 1975, le temps de corriger une anomalie de calcul.

La réforme de 2026 s’inscrit donc dans cette continuité : reconnaître que le diagnostic n’est pas figé, mais doit évoluer avec la réalité énergétique et les objectifs climatiques.

Qui sont les grands gagnants ?

Selon le ministère de la Transition énergétique, environ 850 000 logements sortiront mécaniquement de la catégorie des “passoires énergétiques”. Il s’agit principalement de studios et T1 chauffés à l’électricité, pour lesquels la consommation rapportée au mètre carré est élevée, mais dont l’empreinte carbone réelle est faible.

En pratique, un studio de 25 m² chauffé par convecteurs, aujourd’hui classé G, pourrait passer en E dès janvier 2026, sans qu’aucun travaux ne soit entrepris. Pour les propriétaires bailleurs, cela change tout : le bien redevient immédiatement louable, alors que la loi Climat prévoyait son interdiction.

« Environ 850 000 logements sortiront automatiquement des classes F et G au 1er janvier 2026 grâce au nouveau mode de calcul, sans qu’aucun logement ne soit rétrogradé. »

(Ministère de l’Économie et des Finances, actualité publiée le 21 février 2024)

Une conséquence directe sur la valeur immobilière

Cette amélioration automatique des étiquettes va mécaniquement revaloriser certains biens. Les notaires et agents immobiliers savent combien une mauvaise note énergétique pèse sur une transaction : un logement classé F ou G se négocie en moyenne avec une décote de 10 à 20 %. Passer de G à E, c’est donc regagner en valeur patrimoniale et en liquidité.

On retrouve ici un parallèle avec la réforme de 2021 : lorsque le DPE est devenu opposable, certains biens ont vu leur prix baisser brutalement. La réforme de 2026 aura l’effet inverse pour une partie du parc immobilier.

Ce que la réforme ne résout pas

Toutefois, il ne faut pas se méprendre : améliorer artificiellement l’étiquette ne réduit pas la consommation réelle du logement. Un appartement mal isolé continuera de coûter cher à chauffer, même si son classement officiel s’améliore.

De plus, la réforme ne concerne pas les logements chauffés au gaz ou au fioul, qui resteront majoritaires parmi les “passoires énergétiques”. Les interdictions progressives de location prévues par la loi Climat s’appliqueront toujours :

  • interdiction des G dès 2025,
  • interdiction des F en 2028,
  • interdiction des E en 2034.

Ainsi, si certains propriétaires retrouvent une marge de manœuvre, d’autres devront encore investir massivement dans la rénovation pour conserver leurs revenus locatifs.

Quels effets juridiques et administratifs pour les propriétaires ?

À partir de 2026, tous les DPE réalisés intègreront automatiquement le nouveau coefficient. Pour les diagnostics déjà effectués, l’ADEME délivrera gratuitement une attestation de nouvelle étiquette via son Observatoire DPE-Audit. C’est une innovation administrative importante : elle évite de refaire un diagnostic et limite les coûts pour les bailleurs.

D’un point de vue juridique, cette attestation aura la même valeur qu’un DPE actualisé. Les propriétaires pourront donc s’en prévaloir en cas de mise en location ou de vente, sécurisant ainsi leurs opérations.

Vers une électrification assumée du chauffage

Ce changement traduit une stratégie plus globale : encourager l’électrification du chauffage en France. Alors que les objectifs européens imposent une sortie progressive des énergies fossiles, le gouvernement aligne le DPE avec cette trajectoire. La pompe à chaleur, déjà massivement soutenue par MaPrimeRénov’, sort renforcée de cette réforme.

Comparativement, les choix passés en matière de coefficient de conversion avaient freiné l’essor du chauffage électrique en rendant ces logements artificiellement “mauvais élèves”. L’ajustement de 2026 corrige cette incohérence et repositionne l’électricité comme une solution de transition crédible.

Que doivent faire les bailleurs dès maintenant ?

Il serait risqué d’attendre 2026 en espérant un reclassement automatique. Les bailleurs doivent dès aujourd’hui :

  • identifier les biens chauffés à l’électricité et vérifier leur étiquette,
  • anticiper la revalorisation éventuelle dans leur stratégie patrimoniale,
  • mais surtout prioriser les travaux structurels (isolation, ventilation, chauffage performant) pour préparer les prochaines échéances légales.

Autrement dit, le DPE 2026 est une respiration bienvenue pour certains, mais il ne doit pas servir d’alibi pour différer des rénovations qui resteront, tôt ou tard, indispensables.


La réforme du DPE en 2026 illustre la difficulté d’établir un diagnostic juste, capable de concilier équité énergétique et incitations écologiques. Après les critiques et ajustements de 2021 et 2022, ce nouveau recalibrage montre que l’outil est perfectible et évolutif. Pour les bailleurs, c’est une opportunité : des logements injustement stigmatisés retrouvent de la valeur et peuvent rester sur le marché locatif.

Mais c’est aussi un rappel : la véritable performance énergétique ne se décrète pas par un coefficient, elle se construit par la rénovation.

Chez Rentilot, nous intégrons ces évolutions dans notre accompagnement : nos outils permettent aux bailleurs de suivre l’impact réglementaire sur leur parc, de simuler la rentabilité de leurs biens et d’anticiper les décisions stratégiques.


Sources :

1. Ministère de l’Écologie
2. Ministère de l’Économie
3. Connexion France
4. Les Formations de Louis

Depuis 2019, il construit et rénove son propre parc locatif, tout en concevant des solutions digitales pour simplifier la gestion. De cette double expérience est né Rentilot, une plateforme pensée par un bailleur pour des bailleurs, avec l’ambition de rendre la gestion locative et patrimoniale à la fois simple et efficace.